De la part du Provincial de France.

"Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui sont morts". 1 Cor 15, 20



Le Père Provincial de France des "Missionnaires d'Afrique"
vous fait part du retour au Seigneur

du Père René Le Clerc

du diocèse de Nantes

décédé le 22 Janvier 2010

à l' Hôpital Jeanne Garnier
à PARIS

France


à l'âge de 84 ans

dont 58 ans de vie missionnaire essentiellement en Algérie et en France .

À El-Goléa, le Père René Le Clerc a rassemblé une collection complète sur la géologie et la paléontologie du Sahara. Cette collection est à El Goléa.

* Témoignage du Père Georges Riffault M.Afr au sujet du Père René Le Clerc décédé le 22 Janvier 2010

Le Père René Le Clerc dans son musée (au centre) (à gauche)
. Le Père René Le Clerc devant la tombe de Charles de Foucault (à gauche)


Eucharistie à El Goléa, avec Mgr Michel Santier, évêque de Luçon,
à gauche, le Père René Le Clerc
, Juillet 2007 (à gauche sur la photo)

Les obsèques du Père René Le Clerc, seront célébrées par son Evêque, Claude RAULT,
le mercredi 27 janvier 2010 à 10 heures
à l'Eglise Saint Pierre de Montrouge, paroisse de la Communauté des Pères Blancs de la rue Friant
82 avenue du Général Leclerc.
Ensuite il sera inhumé au cimetière de Montrouge, à deux pas de la Communauté,
avec ses frères Pères Blancs, Missionnaires d'Afrique
qui l'y ont précédés et l'ont déjà accueilli, introduit et accompagné auprès du Père plein de miséricorde.

* Photos des obsèques du Père René Le Clerc, à Paris

Prions pour lui et les membres de sa famille.

Guy Vuillemin, M.Afr.

* * *

MESSAGE DE Mgr Claude RAULT

évêque du diocèse de Laghouat-Ghadaïa

Bien chers amis,

Voici donc que notre Père René Le Clerc a rendu son dernier souffle après une longue maladie. C’était hier, vendredi 22 janvier. Il a pu être accompagné jusqu’au bout avec beaucoup d’affection et de tendresse fraternelle, notamment à la maison d’accueil des Pères Blancs de la rue Friant à Paris.

Au début de l’été, il avait quitté sa chère ville d’El Meniaa (El Goléa) où il avait passé la plus grande partie de son existence. Il faisait même partie des « anciens » dans cette ville où il connaissait beaucoup de monde. Depuis plus de 50 ans, sa silhouette était devenue familière dans les rues de cette petite oasis saharienne. Il connaissait les grands parents, parents, enfants et petits enfants d’un grand nombre de familles. A chaque fois que je marchais dans les rues avec lui, j’étais impressionné par le nombre de gens qui le saluaient familièrement.

Depuis la passation, en 1976, du Centre de Formation Professionnelle dont il avait été le directeur, il avait travaillé avec une passion tranquille à l’aménagement d’un petit musée. La paléontologie et la préhistoire lui étaient d’abord un passe-temps. Elle est devenue pour lui une vocation, qui n’était pas en concurrence avec sa vocation de prêtre, bien au contraire. Il puisait à la source de préhistoriens célèbres tels que l’abbé Breuil et le P. Teilhard de Chardin. Sa quête de sens restait toujours en éveil.

Quand ses jambes étaient encore solides et que la situation le permettait, il parcourait le désert, à la recherche de pierres, de fossiles, d’outils préhistoriques, qu’il datait, répertoriait et mettait dans le petit musée communal dont il avait la responsabilité. Au fil des ans, il avait ainsi collectionné tellement de vestiges que ce musée était devenu trop exigu.

De passage à El Meniaa, le Président de la République d’alors, M. Chadli Benjedid fut impressionné par le travail de cet homme, et ordonna la construction d’un musée « régional » confié à la Mairie. Finalement à force de persévérance, ce musée est sorti de terre, et le Père Le Clerc l’a aménagé, et y a entreposé tous les fruits de ses recherches. Ce musée a fait l’admiration de ses visiteurs, l’objet de reportages à la télévision algérienne et peu de temps avant sa mort, par décision ministérielle, a été classé « Musée Régional » sous la tutelle du Ministère de la Culture.

Le Père René s’était vu attribuer le sobriquet de « Caïman », Ce n’était pas certes par son caractère agressif… il était bon et jovial ! Simplement parce qu’un confrère, vivant seul comme lui, avait déclaré qu’il fallait être « un seul caïman par marigot » ! S’il était resté seul, ce n’était pas par goût de la solitude ou à cause d’un caractère asocial. Comme ses compagnons de communauté avaient quitté El Meniaa, ses responsables de l’époque lui avait demandé de rester pour animer la petite paroisse, et assurer le service eucharistique de la communauté des Sœurs Blanches engagées dans cette oasis.

Il n’était pas enfermé dans ses recherches en préhistoire et en paléontologie. J’étais surpris par le nombre des revues de spiritualité ou de théologie dont il se nourrissait. Ses petites homélies étaient d’une actualité étonnante, et révélaient un homme de prière et d’intériorité.

Les dernières années de sa vie, sa marche devenait plus difficile et plus lente, sa santé commençait à donner quelques inquiétudes, mais son esprit malin et vif restait toujours en éveil. Il avait beaucoup d’humour, ses expressions et bons mots resteront légendaires, comme les noms de dinosaures qu’il aimait attribuer à ses compagnons qui se voyaient confier quelque responsabilité (Provinciaux, vicaires généraux et même évêques…). S’il a pu rester longtemps à El Meniaa, c’est grâce à quelques bons amis qui veillaient sur lui, et sans les nommer, je tiens à leur rendre hommage.

Il a consenti à quitter El Meniaa pour rejoindre la communauté de Ghardaïa après l’été. Ce fut déjà pour lui un premier « exil »… même s’il s’y est trouvé très bien entouré. Il y mettait son petit grain de gaîté, cachant avec courage ses souffrances et ses maux. Il a dû finalement revenir en France pour des soins médicaux appropriés. On avait détecté une grave et « longue maladie ». Tout a été fait par nos confères de la Rue Friant pour qu’il puisse faire son Grand Passage dans la plus grande humanité. Qu’ils en soient remerciés.

Franchissant les barrières du temps passé et futur, le Père Le Clerc est entré dans le Grand Aujourd’hui de Dieu. Nous le voyons mal figé dans un petit coin, contemplant la grande liturgie céleste. Ce n’était pas sa spiritualité. Le voici maintenant, en compagnie de tous ces « chercheurs » qui ont enfin « trouvé » parcourant les Espaces infinis du Ciel et visitant les Etoiles.

+Claude Rault.

le 23 janvier 2010


P. René Le Clerc avec son évêque

(*) les caractères en gras sont de la rédaction ADS. Cliché du 22 janvier 2008 transmis le 23/01/10 par Tayeb B.

* * *

Envoi aussi de Georges Riffault M.Afr qui s'est occupé de René jusqu'à son dernier jour à Paris

voici le texte qu'il avait composé pour la célébration du Mercredi des Cendres
qui nous introduit dans le Carême des chrétiens ;
célébration qui se déroulait à El Goléa, en 1978 sur un immense site néolithique allant jusqu'aux Bekrats.
Le sable utilisé pour la célébration - simple poussière noire - venait de ce site,
il suffit de creuser à 20 cm pour le trouver !...
C'est un texte très parlant aujourd'hui, au moment où René entre dans un monde de lumière et de résurrection
et où son corps devient "semence d'éternité" :

"Tu es poussière,
En prenant de la cendre mélangée de sable sur un site préhistorique,
nous exprimons notre solidarité avec tous ceux qui sont passés avant nous !
Nous communions au mystère de l'homme et du cosmos.
Nous sommes partie intégrante du monde matériel,
et notre corps retournera à ce monde dont nous sommes solidaires
et qui nous a donné cette partie de nous-mêmes.
Nous faisons un acte de foi dans le mystère de la Transfiguration au-delà de notre mort :
Transfiguration de l'humanité
Transfiguration du Cosmos.
Réalisme devant la mort et la perte de notre signe visible,
Réalisme devant notre destinée, le Royaume.
Semence d'éternité"

Et vous trouvez ce texte, manuscrit, en dessous
et aussi, , une des dernières photos du "Caïman"
prise par un de ses amis très chers


manuscrit.



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Jalons de la vie du Père René Le Clerc

Nat.: Fr.
Diocèse d'origine
Nantes
NAISSANCE
Rezé (44)
21-09-1925
Année Spirituelle
Maison-Carrée
29-09-1948
Serment
Thibar
26-06-1951
Prêtrise
Carthage
12-04-1952

Enfance études
21/09/1925 Né à Rezé (44) Diocèse de Nantes France
27/09/1925 Baptême paroisse de Rezé
04/06/1936 Confirmation paroisse N D de Lourdes - Nantes
Petits Séminaires (44) Legé et Les Couëts / Bouguenais
2 ans Grand Séminaire Nantes
1950-1951 Théologie à Thibar en Tunise
1952 Théologie à Carthage en Tunise
26/06/1951 Serment à Thibar en Tunise
12/04/1952 Prêtrise Carthage en Tunise

Mission en Algérie
Juin 1952 Nommé vicaire à Ghardaïa en Algérie
1954 Biskra
21/12/1957 Touggourt
15/05/1958 El-Goléa
21/05/1960 Supérieur à El-Goléa
01/01/1966 Supérieur et directeur FPA à El-Goléa
30/09/1967 Supérieur à Biskra
08/08/1968 Supérieur à El-Goléa
2009 Transfert du musée Ghardaïa

Retour en France
06/12/ 2009 Temps de maladie Friant France
22/01/2010 Retour à la maison du Père Hôpital Jeanne Garnier à Paris


HOMELIE de Mgr Claude RAULT

Bien chers amis,

C’est avec un peu de confusion que je me trouve ici, je vous le confie. Ce voyage en France était programmé depuis longtemps, et j’étais loin de penser que je conduirai avec vous notre cher Père René à sa dernière demeure. Serait-ce un petit signe de lui, comme s’il m’avait attendu ? En tout cas, permettez-moi d’accueillir le fait que je sois ici comme un sourire venant de lui.

René n’était pas un homme banal. Je l’ai connu il a déjà assez longtemps et nous avons vite appris à nous apprivoiser. C’était un homme rempli de bonté, de douceur et de délicatesse.
S’il était resté seul à El Meniaa, ce n’est pas parce qu’il était impossible en communauté, mais par obéissance. Ses compagnons de communauté en effet avaient dû quitter El Meniaa à cause de la nationalisation du Centre de Formation Professionnelle dont il était le directeur. Il est donc resté pour animer la petite communauté chrétienne locale, composée essentiellement des Sœurs Blanches.

Mais il s’était déjà donné une passion : la paléontologie, la préhistoire, la géologie… qui de passion sont devenus pour lui « vocation ». Une vocation qui ne venait certes pas doubler sa vocation sacerdotale. Au contraire. Le fait d’être prêtre donnait un surcroît de sens à ses recherches et à ses travaux. Cela marquait ses homélies qui ne traînaient pas en longueur, mais étaient profondes et simples.
Un soir, après avoir pris le repas sommaire qu’il avait lui-même préparé dans ce qu’il appelait sa « salle de communauté » où n’avaient le droit d’entrer que les initiés… je lui demandai comment il voyait l’évolution de l’homme en lien avec sa foi. C’était peu de temps après la découverte de « Lucy », l’une de nos « ancêtres », au Kenya…
« Vois-tu, me dit-il, il y a dans le continent africain une grande faille géologique qui part de l’extrémité de l’Afrique à l’autre, de l’Afrique du Sud à l’Egypte, et qui se prolonge jusqu’en Asie en passant par la Palestine. Et c’est dans cette faille géologique qu’a été plantée la Croix de Jésus. C’est là que s’est joué le destin de l’humanité. C’est là que nous trouvons le sens de la Vie. ».
Je trahis un peu la conversation en la condensant en quelques mots, mais je garde de cette soirée un souvenir inoubliable et le lien entre sa vocation de prêtre et de chercheur.
En préparant ce petit mot pour lui, me revient ce beau texte de Teilhard de Chardin dans sa « Messe sur le Monde » Il lui convient très bien aujourd’hui :
« Celui qui aura aimé passionnément Jésus dans les forces qui font mourir la Terre, la Terre, en défaillant, le serrera dans ses bras géants, et avec elle, il se réveillera dans le sein de Dieu ».

Le Père René assurait aussi le service eucharistique de la communauté des Religieuses d’El Meniaa. Elles appréciaient beaucoup sa tranquille présence. Et aussi ses petites homélies, presque toujours en phase avec l’actualité ou avec ses propres découvertes.
Il lisait beaucoup, même si ses lectures se sont espacées les dernières années. Les nombreuses revues auxquelles il était abonné en témoignent, et de nombreux livres aussi.

Que dire de son environnement humain ? Pendant plus de cinquante ans, sa silhouette massive a arpenté les rues d’El Meniaa. Il y connaissait beaucoup de monde, de plusieurs générations. Il était devenu presque inséparable de cette population, en était devenu une figure connue et reconnue. S’il a pu demeurer longtemps, c’est grâce à des amis proches qui l’avaient pris en affection et qui prenaient soin de lui. Ils ne sont pas là, mais je tiens à les remercier ici. Ils auraient aimé être parmi nous.

Enfin, je voudrais encore vous dire une raison qui a poussé sans doute poussé le Père René à rester à El Meniaa. C’est la présence du tombeau du Père de Foucauld dont il est devenu le gardien fidèle. Il y faisait des visites régulières, parfois y accueillait des groupes de pèlerins. Et bien sûr cette visite était souvent précédée ou suivie d’une visite au Musée. Les pèlerins n’en étaient pas les seuls visiteurs. Il y avait mis tout son cœur, tout son savoir, avec la même foi qui l’animait lorsqu’il célébrait la messe !

Voilà le sens de cette vie qui vient de s’éteindre à nos yeux mais qui s’est mystérieusement ouverte à son plein accomplissement.

Mais pour finir, je voudrais vous laisser quelques paroles de lui, tout à fait dans le sens de ce que nous célébrons aujourd’hui.
Nous avons retrouvé ce qu’il avait griffonné sur une feuille ce qu’il avait dit lors de la célébration du mercredi des Cendres 1978 :

« Tu es poussière. En prenant de la cendre mélangée de sable sur un site préhistorique, nous exprimons notre solidarité avec tous ceux qui sont passés avant nous.
Nous communions au mystère de l’homme et du Cosmos. Nous sommes partie intégrante du monde matériel, et notre corps retournera à ce monde dont nous sommes solidaires, et qui nous a donné cette partie de nous-mêmes. Nous faisons un acte de foi dans le Mystère de la Transfiguration, au-delà de notre mort.
Transfiguration de l’humanité.
Transfiguration du Cosmos.
Réalisme devant la mort et la perte de notre signe visible
Réalisme devant notre destinée, le Royaume. Semence d’Eternité. »

C’est dans cette Eternité qu’est entré notre frère René. Il a rejoint tous ces chercheurs de sens, tous ces assoiffés d’infini, mais aussi toutes ces petites gens qui l’ont précédé dans le Royaume, qui l’attendaient et dont il partage aujourd’hui la joie.

Amen.

St Pierre de Montrouge. 27 janvier 2010.

 

 

"Il ne faut pas que vous vous attristiez comme les autres qui n'ont pas d'Espérance". Thess 4,13

Nous le recommandons instamment à votre prière.

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