La Société des Missionnaires d'Afrique - Pères Blancs

    LA COMMUNAUTE de MARSEILLE


Cités, dont “La Solidarité” où les Pères Blancs travaillent à Marseille.

    La communauté des Pères Blancs de Marseille est implantée depuis septembre 1994 dans le 15e arrondissement, à l’extrême nord de la ville. Nous sommes installés dans un secteur paroissial où vivent au moins 30 000 personnes aux croyances diverses et aux origines européennes, africaines et asiatiques.

    L’ouverture de cette communauté fait suite à une double réflexion. Le synode de Marseille, achevé en 1991, a pris en compte la présence sur le territoire diocésain d’un grand nombre de migrants de diverses religions et de diverses cultures... Notre Société des Missionnaires d’Afrique, en son chapitre général de 1992, a inscrit dans son projet missionnaire la rencontre des musulmans et des africains vivant dans les pays occidentaux. La Province de France, s’appuyant sur les orientations du chapitre a formulé un projet visant à la rencontre des “migrants musulmans et africains”... Cette intuition a été confirmée par le chapitre de 2010 insistant sur la présence de projets missionnaires dans la province d’Europe.

    Dans notre équipe, nous avons des tâches diverses :

    Jacques travaille près des migrants

    C’est Jacques qui est plus attentif aux questions de migrants.
    Pour cela, il participe à la commission pastorale des migrants qui se réunit une fois par mois, rassemblant laïcs, prêtres et religieuses, tous engagés, d’une manière ou d’une autre, très activement dans le monde de la migration ; engagements plus “militants” avec les Roms, auprès des sans-papiers avec la Cimade ou bien engagements plus “pastoraux” auprès des Philippins, des gens du voyage ou des africains. Cette commission est un “haut lieu” de partage de toutes les problématiques des migrants à Marseille... mais nous ne sommes heureusement pas les seuls à le faire.

    Jacques est membre du bureau de cette commission et participe aux rencontres provinciales de la pastorale des migrants. Les différentes initiatives prises dans les diocèses donnent des idées et du courage aux uns et aux autres... (quoique certains diocèses, comme Avignon, n’y participent pas). Parce que du courage, il en faut, devant les situations très dures faites aux migrants, tant devant les difficultés venant du gouvernement et de l’administration que devant les mentalités pas toujours prêtes à “accueillir”...

    Chaque année, en janvier, depuis trois ans, la “Journée du migrant et du réfugié” est un beau temps fort qui rassemble, grâce aux différentes aumôneries, des gens de tous peuples et de toutes nations pour un très beau temps festif et de prière.
    Jacques participe également aux rencontres de la Communauté chrétienne africaine de Marseille et fait parti de son bureau.


    Jacques au milieu d’un groupe d’alphabétisation.

    Pour ce qui est de son enracinement sur le terrain, il passe deux matinées par semaine au centre-ville comme écrivain public avec l’association “L’encre bleue” (association locale qui vient de fêter ses 20 ans). Nous sommes 6 à 8 écrivains publics et ça ne désemplit pas pendant les deux heures où nous travaillons : essentiellement avec des publics étrangers incapables d’écrire ou perdus et affolés devant des papiers administratifs bien compliqués à remplir. Logement, emploi (beaucoup de CV que Pôle emploi n’a plus le temps d’aider à rédiger), santé, résiliation d’abonnements et de contrats, toutes ces questions “basic” qui rendent si difficile la vie de tant de gens...

    Et puis deux autres matinées par semaine sont consacrées à l’alphabétisation dans un centre social du quartier (“Centre Social du Grand Saint Antoine). 12 à 16 femmes toutes issues de l’immigration, certaines sans papiers, d’autres ici depuis longtemps, viennent apprendre le français tout autant que se retrouver entre elles dans un groupe fort sympathique... Les échanges y sont passionnants et il y a du bonheur à voir progresser certaines d’entre elles !

    Étienne et Raphaël
    en relation avec les musulmans

    Depuis quatre ans, Étienne est délégué de l’évêque pour les relations avec les communautés musulmanes et partage cette tâche avec une sœur xavière. Dans ses activités, il a été rejoint par Raphaël, maintenant nommé désormais de façon stable à notre communauté et qui s’exprime ainsi, car il a la plume facile :
    « Je vous écris depuis le local-chapelle que nous avons au pied de plusieurs tours de 20 étages dans les quartiers Nord de Marseille.

    Des quartiers que toute la France connaît sous le nom de “ quartiers sensibles”. Sur la porte de notre local-chapelle, l’inscription en larges caractères rouges : “Communauté Catholique”. Un titre un peu pompeux pour l’humble assemblée qui s’y réunit le dimanche pour prier. Mais un lieu tout proche des musulmans. En effet, notre chapelle a un mur mitoyen avec la mosquée du quartier. L’imam à qui je faisais remarquer qu’il avait plus de fidèles que moi, me dit en souriant : « Oui, c’est un quartier populaire. » Voulait-il dire par là que le christianisme s’adresse aux classes aisées et l’islam aux classes populaires? Nous aurions aimé que ce local serve pour des cours de soutien scolaire à des jeunes et des enfants, mais il faudrait un jeune confrère pour ces jeunes…

    D’ailleurs, fin 2014, l’immeuble où se trouvent ce local-chapelle et la mosquée va être démoli dans le plan de restructuration de la Cité. Une proposition nous est venue de la part du président de mosquée de demander un terrain à bail emphytéotique pour qu’on y construise ensemble un bâtiment côte à côte… Un beau symbole qui aurait du sens aujourd’hui. Mais, même si nous ne sommes pas au bout de cette belle idée, y aura-t-il un jeune confrère pour la prolonger ? »
    Raphaël et Étienne ont par ailleurs deux activités qui, dans un cadre différent, rejoignent le travail de Jacques : c’est d’abord la participation à l’ “Encre bleue”, dans un des centres sociaux de nos neuf cités. Là, la connaissance de l’arabe est bien sûr un atout dans ce milieu à grande majorité maghrébine. Et tous deux font comme Jacques un cours d’alphabétisation.


    Notre-Dame de la Garde

    Il y a aussi les rencontres régulières avec les imams. Ces rencontres ont commencé il y a plus de trois ans. Nous nous retrouvons à 5 ou 6 prêtres et une religieuse et autant d’imams de la ville de Marseille. Les thèmes de nos échanges préparés en duo, un prêtre, un musulman, traitent de tous les sujets sensibles, même ceux qui fâchent. Nous avons ainsi abordé, entre autres : “Monothéisme chrétien et monothéisme musulman”, “ La place de la prière dans nos vies “, “ Respect des principes et évolution”, “Liberté de conscience”, “Autorité religieuse dans nos traditions”…

    Nous aimerions aller plus loin et déboucher maintenant sur des actions communes. Pour commencer, nous visons à encourager des communautés chrétiennes à aller visiter une mosquée et des communautés musulmanes une église. Quand on sait que ces imams sont responsables d’imposantes communautés sur Marseille, il est important que le dialogue se noue avec les responsables de communautés chrétiennes, surtout dans le contexte des extrémismes de tous poils. Ces imams sont pour la plupart des imams jeunes, courageux, audacieux. Notre groupe de prêtres tend à être lui aussi fait de plus en plus de jeunes. Il faudrait un jeune confrère avec ces jeunes … pour prendre le relais.

    Last but not least, nous participons tous deux à une association intitulée « Marseille Escale Étudiants » (EME) une association créée sur Marseille par une vingtaine de bénévoles pour accueillir les jeunes étudiants étrangers, dont beaucoup d’Africains. C’est un lieu d’accueil, d’informations, de conseils, de “coups de pouce” en maths, en français, en anglais, en informatique… Raphaël donne des cours d’anglais à des étudiants africains. Étienne participe à l’accueil et au service d’aide alimentaire très apprécié pour des bourses d’étudiants. Ces diverses rencontres favorisent les échanges : étudiants comme bénévoles en sont heureux. Il faudrait avec ces jeunes africains, un jeune confrère … africain.

    Jean-François,
    curé de paroisses

    C’est dans le cadre de la paroisse Saint Antoine et “Notre Dame Limite” (aux limites de Marseille) que nous vivons notre insertion dans le diocèse de Marseille, et c’est Jean-François qui en est le curé depuis maintenant quatre ans.
    150 à 200 fidèles (pratiquants très réguliers) se retrouvent dans les deux églises du secteur.

    Jean-François prend en charge la coordination de la catéchèse, la pastorale auprès des occasionnels pour les baptêmes, les mariages et les funérailles, la préparation au mariage. Il visite les familles, particulièrement les personnes malades et isolées. Il est aidé en cela par un “conseil paroissial” d’une dizaine de personnes qui assument avec lui toutes les responsabilités : pastorale, organisation, finances, animation...

    Clocher de St-AntoineJean-François est également très présent dans l’école catholique voisine “Sainte Thérèse” : il y assure des catéchèses deux jours par semaine et aide les enseignants à vivre au mieux leur engagement chrétien au service des enfants.
    Chacun des autres confrères prend son tour de service dominical et anime un groupe biblique, y compris un groupe biblique œcuménique avec la paroisse réformée voisine. En tout cela, chacun aide cette petite communauté à s’ouvrir à l’autre. Une messe est célébrée tous les 15 jours dans une cité.

    Nous sommes bien engagés dans les structures diocésaines et nous participons activement à la vie des commissions diocésaines (Islam, migrants et coopération missionnaire) et de diverses institutions (ICM, Chemins de dialogue...)

    C’est Jacques le responsable de la communauté qui édite une fois par mois le planning des activités que nous élaborons ensemble. Un temps pour s’informer des activités des uns et des autres et pour nous coordonner. Un temps pour répartir les tâches quotidiennes : offices, messes...

    Chaque premier samedi du mois, nous nous enfuyons de Marseille, au foyer de Charité de Branguier, pour faire récollection : l’un d’entre nous prépare un thème ou un questionnaire suivi d’un long temps de silence et d’un partage.
    Comme dans toutes les communautés, office en commun, messe du lundi soir, repas partagés nous donnent l’occasion de nous retrouver.

    .
    Maison de Communauté

    Un grand regret : Nous sommes quatre “vieux” blancs plutôt “français” de 63 à 76 ans... et nous aimerions tant pouvoir donner un témoignage d’internationalité ! La présence d’un jeune serait également indispensable pour aller à la rencontre des jeunes et donner un signe fort que la société est vraiment attachée à ce projet, et pour longtemps....

    L’équipe de Marseille
    Photos de Jacques Lacour
    Juillet 2013

    * * *

    Décès du Père Étienne Renaud

    Après une opération du cœur, Étienne est décédé le 20 juin à l’hôpital de Marseille. Voici un extrait de l’homélie que Guy a prononcée à ses obsèques :
    Je rends grâce à Dieu de m’avoir donné de vivre deux ans en communauté avec Étienne au PISAI.

    Très vite, en vivant avec Étienne, j’ai constaté que cet homme, ce frère, ne nous appartenait pas, pas plus qu’il n’appartient à sa famille, pas plus qu’il ne s’appartient à lui-même.

    Pour moi, Étienne était un homme habité par un Autre, Celui qui l’a appelé, auquel il a répondu, pour lequel il s’est mis à vie au service de Sa Mission dans notre petite société missionnaire.

    Sur son visage souriant, accueillant, on pouvait lire les traces de ses dialogues matinaux, les genoux sur ses talons, avec Celui par lequel il s’était laissé saisir. Un peu comme Jésus qui se retirait seul sur la montagne pour se recevoir de Son Père et notre frère.

    Et parce qu’il appartenait à ce Dieu qui ne se lasse jamais d’aller à la rencontre de tous les enfants, cherchant à les faire habiter en Lui, pour les faire vivre de sa Vie, Étienne, en fait, voulait, désirait, au fond de lui-même, je crois, appartenir à tous ceux qu’il rencontrait...

    Homme d’écoute, de conseil, de service, de rencontre, d’humilité naturelle, parce qu’habité par Dieu et habité par ceux que Dieu mettait sur son chemin ou par ceux pour lequel il se déplaçait pour être plus proche d’eux.
    Supérieur Général de notre Société, il n’oubliait pas son tour au service de la vaisselle ou du réfectoire...

    Président du PISAI, il n’oubliait pas les vendredis soirs son service à la “mensa de San’Egidio” pour les sans-abris de Rome, vers la fin du service des tables pour le service du nettoyage, de la vaisselle et des poubelles...

    Toujours avec le même sourire, prêt à l’écoute, accueillant du même accueil chaleureux le plus petit ou le plus grand, sans protocole particulier... Rayonnant de la douceur de Celui qui a dit : « Je suis doux et humble de cœur ! »
    Merci Étienne. Maintenant, avec le Christ, en Dieu, n’oublie pas que nous t’appartenons.

    Guy Vuillemin


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