Voix d'Afrique N°96.

Julius Nyerere
Tanzanie


Considéré comme le père de la nation Tanzanienne, Julius Nyerere est l’une des figures emblématiques de l’Afrique noire et l’un des plus grands chefs d’Etat contemporains. En œuvrant avec une détermination inébranlable en faveur de la liberté, de l’égalité entre les races et les ethnies, il a contribué à la lutte contre le colonialisme et l’apartheid, devenant par là même l’un des symboles de l’unité et de l’émancipation africaines.

Né le 13 avril 1922, le jeune Julius fait des études pour devenir enseignant. Par affection, on l’appellera le mwalimu (l’instituteur). En 1953, il prend, à 31 ans, la tête de la TAA qu’il transforme rapidement en un véritable parti politique – le Tanganyika African National Union (TANU) – qui prône l’indépendance. Elle est obtenue, sans aucune violence, le 9 décembre 1961. D’abord premier ministre, Julius Nyerere devient le premier président de la République du Tanganyika par les élections de décembre 1962. Le 26 avril 1964, le Tanganyika et Zanzibar fusionnent pour former la République unie de Tanzanie.

Soucieux d’accélérer l’émancipation des Africains par rapport au monde occidental, inspiré par les expériences communistes en Chine, Nyerere va faire un choix. En février 1967, sa fameuse déclaration d’Arusha jette les bases d’un socialisme fondé sur l’autosuffisance économique par la solidarité. L’éducation est la priorité numéro un. Il faut dire qu’il y a urgence dans ce domaine : la Tanzanie ne produit à cette époque que 120 diplômés par an.

Les premières mesures concrètes d’application de cette politique ne tardent pas à arriver. Les principales industries et sociétés de services sont nationalisées, les impôts augmentés pour une plus grande répartition des richesses.

C’est au plan de l’agriculture, principal secteur économique du pays, que les changements sont les plus forts. C’est l’heure des regroupements ethniques en villages, l’heure de l’entraide et du travail en commun. Selon son idéal, tout cela doit conduire à la naissance d’une société égalitaire, juste, solidaire, qui trouve dans ses propres ressources les moyens de son autosuffisance. Mais cette politique a un ‘coût’ : pour la création des 800 villages (Ujamaas) collectifs, regroupant des populations d’origines ethniques et tribales différentes, et déplacées de force en camion, on estime qu’en 4 ans, de 1973 à 1976, 9 millions de personnes sont déplacées. On obtient, il est vrai, un certain brassage entre les différentes ethnies qui forment la population tanzanienne, mais cette action casse brutalement les repères humains et communautaires des individus. Cependant, les premiers résultats sont décevants, et le premier choc pétrolier de 1973 assombrit fortement les perspectives économiques du pays.

Les relations de la Tanzanie avec ses voisins africains (en particulier ceux du nord, l’Ouganda et le Kenya) se détériorent au fil des années. Certes, ces trois pays ont formé en 1967 la East Africain Community (Communauté est-africaine) dans le but de constituer à terme un marché économique commun. Mais le Kenya, plutôt proche des pays occidentaux, s’éloigne de plus en plus de la Tanzanie. Et l’Ouganda d’Idi Amin Dada attaque la Tanzanie à la fin de l’année 1978 et envahit les environs du lac Victoria. On reprochait à la Tanzanie de protéger des opposants au régime ougandais. Cette guerre a coûté cher, environ 500 millions de dollars ; et au début des années 1980, sans réelle industrie, avec un secteur agricole improductif, la Tanzanie est l’un des pays les plus pauvres de la planète. Le pays s’enfonçant dans l’échec, Nyerere commence à modifier progressivement sa politique dirigiste.

En 1985, après 24 années de pouvoir, Nyerere choisit, contrairement à l’habitude prise par la plupart des autres chefs d’État africains, de se retirer de la politique. C’est Ali Hassan Mwinyi, alors président de Zanzibar depuis 1980, qui prend sa succession. Malgré les résultats très largement négatifs de sa politique de développement économique, Nyerere conserva jusqu’à sa mort à Londres en 1999, l’estime de beaucoup de Tanzaniens et d’une partie de la communauté internationale. On lui reconnaît en effet le mérite d’avoir posé les bases d’un État démocratique pluriethnique.
Julius Nyerere était catholique pratiquant. L’Église catholique a ouvert sa cause de béatification.

D’après des sources diverses
Voix d’Afrique



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