Voix d'Afrique N°76.....



Un jeune homme pratique
Une bonne paire de bottes, c'est l'équipement essentiel du missionnaire. Lorsque Livingstone est mort, son guide a rapporté à Bagamoyo son corps, avec ses chaussures déjà bien usées, mais en assez bon état pour qu'un missionnaire de la première caravane en profite.

Aujourd'hui, cela ne suffit pas. à l'heure des moteurs à explosion, le missionnaire a besoin d'une moto. Juan est le spécialiste des pistons et des soupapes. C'est pour lui une détente?: armé de tournevis et de clés il démonte et remonte, il règle et ajuste au dixième de millimètre près les bougies et les vis platinées.

Un scientifique
C'est qu'il est doué pour cela. Il est né à Madrid en 1964 dans une famille chrétienne traditionnelle. Les pères salésiens ont veillé sur ses études. C'est un scientifique. Aussi il décide de poursuivre ses études dans le domaine de l'énergie nucléaire : c'est cela, l'avenir?! Il reste très engagé dans les activités d'évangélisation : groupes de jeunes, œuvres caritatives, groupes de discussion et de réflexion.

Il se pose la question de la confirmation : il n'a pas encore reçu ce sacrement à l'âge de 22 ans. Confirmation, d'accord, mais de quoi ? Les études, pour quoi faire ? Ingénieur en énergie nucléaire ? et après ? Six ans d'études pour aller où ? Un engagement en Amérique Latine? Est-ce que cela suffit à donner un sens à ma vie ?

Premiers pas missionnaires
C'est alors qu'il rencontre les Sœurs Missionnaires de Notre Dame d'Afrique (les "Sœurs Blanches ") Il décide d'aller faire une expérience missionnaire en Tunisie, et de retour, la décision est prise : il sera missionnaire. Il part à Londres pour reprendre les études de philosophie et faire une première expérience de vie communautaire.

Après deux ans dans les brouillards londoniens, il est envoyé en Zambie, à Kasama, pour l'année spirituelle. Ils sont une douzaine de jeunes venus d'Afrique et de tous les coins du monde. Combien de nationalités ? peu importe. Chacun se sent accepté, chacun apporte aux autres le meilleur de soi-même, à l'école du Christ. Un grand vent souffle comme à Pentecôte, venu de Tunis ou de Johannesburg, de Bamako ou de Nairobi. Il pense encore parfois à l'aventure scientifique, mais il se sent profondément appelé pour l'Afrique.

 

Au Malawi
Il est envoyé au Malawi pour un premier stage de deux ans de vie missionnaire. Première étape : la langue. Juan s'initie aux méandres des langues bantoues, les neuf classes de noms, les suffixes et les conjugaisons. Il est nommé au bord du lac, au milieu d'une population insouciante, des pêcheurs désinvoltes, accueillants, mais assez superficiels. Les sectes pseudo-chrétiennes se comptent par dizaines ; la constance et la persévérance sont des obstacles quotidiens.

Juan visite les petites communautés chrétiennes, parfois très petites, mais peu importe le nombre pourvu qu'on se rencontre, car le Christ est là. En contemplant le lac Malawi, les pêcheurs et leurs filets, comment ne pas se souvenir du lac de Génésareth ?

Au milieu des Watonga
C'est à Nairobi qu'il va faire ses études en théologie pendant trois ans. En 1999 il est ordonné prêtre et envoyé à nouveau chez les Watonga, la population qu'il a bien connue à Nkhata Bay, pendant son stage au Malawi. Il retrouve sa vieille moto, les succursales dans les montagnes ou au bord du lac, les groupes de jeunes enthousiastes. Chaque fin de semaine, il parcourt en moto ou à pied, voire en bateau, les chapelles où chrétiens et catéchumènes l'attendent. Quand il revient à la mission, il y a toujours quelque moteur à ajuster, des instructions à préparer, des registres à mettre à jour. Des amis viennent le rencontrer pour résoudre un problème, pour demander conseil, ou tout simplement pour passer un petit moment ensemble, car la porte est toujours ouverte chez les missionnaires. Et quand il a besoin de se relaxer, il prend sa caisse à outils et va faire quelque travail de plomberie, quelque dépannage sur un ordinateur ou sur les installations électriques récentes de la mission.

A Rome, nouvelle aventure !
" Juan, tu es appelé à Rome ! " C'est la tuile. Il était si heureux à Nkhata Bay. Voilà qu'il va falloir reprendre une autre aventure, avancer sur une autre route. Les responsables lui expliquent : " On a besoin de toi. La Société a besoin de juristes et nous avons pensé que cela serait dans tes cordes ". Et c'est parti pour de nouvelles études, des cours, des livres, des heures sur l'ordinateur. Il doit apprendre l'italien, car tout se passe à Rome, en vue d'obtenir des diplômes en droit civil et en droit canonique. Heureusement il peut se détendre parfois en travaillant sur un des ordinateurs des étudiants ou du secrétariat de la Maison Généralice.

Quelle perspective ? Depuis Madrid, Londres, Kasama et Nkhata Bay, le Seigneur a été fidèle, comme le cep de vigne est fidèle aux sarments. Depuis l'énergie nucléaire jusqu'au droit canonique, la sève qui coule jusqu'aux feuilles et aux grappes de raisin, c'est l'Amour?:

"Demeurez dans mon amour, comme moi je demeure en vous. " Que ce soit en Afrique ou à Rome, en mécanique ou en droit canonique, l'important c'est d'aimer.


Voix d'Afrique.


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