Missionnaires d'Afrique
France Paris


Hubert Barbier M.Afr.

Une vie
pleinement missionnaire 

Problèmes de développement,
défense des droits de l’homme, etc.

Durant mes études secondaires, je me suis orienté vers les mathématiques et le dessin industriel. J’ai résisté à l’appel du Seigneur jusqu’à l’âge de 21 ans. Après Kerlois, le noviciat à Maison Carrée, le service militaire en Algérie et en France, j’ai fait ma théologie à Thibar et à Carthage.

Il n’y avait pas de douches à eau chaude à Thibar. J’ai alors trouvé auprès de parents et amis une partie de l’argent nécessaire à l’installation de douches à eau chaude. Cela a dû être inscrit dans mon dossier car, après mon ordination à Carthage en 1953, ma première nomination a été pour Nasso, près de Bobo-Dioulasso, comme économe et constructeur d’un séminaire moyen, où j’ai installé la comptabilité par décalque à main en partie double.

Après 4 ans au séminaire de Nasso, j’ai souhaité aller apprendre une langue africaine et faire du ministère. On m’a envoyé au Mali, dans le diocèse de Sikasso. Après le stage de langue, l’évêque de Sikasso m’a prié de m’occuper des finances et des projets de développement, ce que j’ai fait jusqu’à mon départ en congé.

De nouveau, à la fin de mon congé, j’ai été nommé économe général de l’archidiocèse de Bamako au Mali. Je dois dire que j’en ai pleuré car je savais que de très gros problèmes m’attendaient : il fallait remettre de l’ordre dans les finances de l’archidiocèse.

J’ai gardé la charge de vicaire épiscopal et d’économe général de Bamako pendant 16 ans, deux ans avec un archevêque Père Blanc, Mgr Leclerc, et 14 ans avec un archevêque africain, Mgr Luc Sangaré. Au cours de cette période de 16 ans, il a fallu équiper et construire presque tout dans l’archidiocèse.

Avec l’autorisation de Mgr Sangaré et l’aide du Lions Club International, j’ai créé et animé un village de postcure pour la réhabilitation sociale des lépreux. Dans cette optique, j’ai participé à plusieurs congrès en Afrique et même à Mexico.

Au Soudan
Hubert discutant avec Mgr Gabriel Zubeir Wako, maintenant cardinal archevêque de Khartoum (Soudan).Rentré en France pour mon congé, j’ai reçu une nouvelle nomination : je devais réapprendre l’anglais et aller au Soudan pour prendre en charge un des plus importants projets financés par Misereor d’Allemagne. J’ai accepté cette nomination. Il s’agissait de réaliser un Institut polyvalent pour former le personnel paramédical du Sud Soudan : cela impliquait de construire 20 bâtiments à 2 000 km d’un port, de les équiper, de déterminer les programmes médicaux avec le gouvernement du Sud Soudan et l’OMS, de trouver du personnel et de remettre en état une partie de l’hôpital gouvernemental pour les travaux pratiques des étudiants et étudiantes. L’institut a été officiellement inauguré en 1983, et les premières élèves sagefemmes furent diplômées en 1985.

Après 9 ans au Soudan, mes supérieurs m’ont nommé en France. J’ai été chargé du service relations. Je devais contacter les directeurs d’entreprises pour trouver des subsides pour nos activités en Afrique. Mais dès 1987, j’ai voulu voir ce que l’on pouvait faire pour le Soudan. J’ai pu rencontrer le docteur Bernard Kouchner, Secrétaire d’État à l’action humanitaire, Madame Simone Veil, du Parlement européen, qui a obtenu que le Soudan soit condamné pour ses violations aux droits de l’homme. Mais cela ne suffisait pas.

Vigilance Soudan
En janvier 1992, avec 2 amis nous avons fondé le comité “Vigilance Soudan” pour la défense des droits de l’homme au Soudan. Son but était l’information et la sensibilisation aux problèmes du Soudan. En avril 1992, nous avons publié notre premier bulletin ; nous en sommes pour le moment au numéro 158.

C’est de son bureau qu’Hubert s’informait et envoyait les articles sur le site de Vigilance Soudan.En décembre 1992, j’ai participé à un colloque dont le thème était : “Le problème des minorités chrétiennes au Proche et Moyen Orient”.

Le Père Henri Boulad, vice Provincial des Pères Jésuites d’Égypte a déclaré : “Il y a un problème très grave dont on ne parle pas : ce sont les minorités chrétiennes du Soudan”. Il a ajouté : “Il y a avec nous le Père Hubert Barbier, ancien missionnaire au Soudan, qui connaît bien ce problème”. Après cette intervention, le président du colloque m’a donné la parole. J’ai dû parler avec enthousiasme car, à la pause, M. Littman, du Mouvement International de la Réconciliation, est venu me dire : “Il faut que l’on vous aide à intervenir à la commission des Nations Unies des droits de l’homme à Genève en février-mars prochain !” Cette intervention fut fixée au 16 février. Lire l'intervention à Genève le 16 février 1993 à la Commission de Nations Unies pour les Droits de l’Homme (Au sujet du Soudan)

(Voir aussi Conférence par S.E. le Cardinal Paul Poupard, "Joséphine Bakhita, l'Africaine 1869-1947
De l'esclavage à la liberté du Christ.
) (Paris 30 Mars 2003)

Alors que nous préparions mon intervention pour Genève, M. Littman m’a envoyé un document que faisait circuler la délégation soudanaise. Ce document affirmait “qu’il n’y avait pas de détenus politiques au Soudan”. Nous avons donc ajouté à la fin de mon intervention : “Puisque le Soudan dit qu’il n’y a pas de détenus politiques au Soudan, nous demandons à la commission des Nations Unies des droits de l’homme de nommer un rapporteur spécial pour enquêter au Soudan”.

La résolution votée à la fin de la session a condamné le Soudan pour ses violations aux droits de l’homme et a demandé que soit nommé un rapporteur spécial pour aller enquêter sur ces violations. Ce fut le premier grand succès du Comité Vigilance Soudan. À partir de ce moment-là, ma voie était tracée : il fallait défendre les droits de l’homme au Soudan.

Ma voie était tracée
Vente de vin en faveur des Missionnaires d’Afrique organisée par Hubert.Nous avons créé un comité de coordination avec le Secours Catholique, le CCFD, l’ACAT, Pax Christi, la Cimade et Vigilance Soudan. En octobre 1996, nous avons organisé un colloque avec célébration œcuménique, et une table ronde dans une salle de l’Assemblée nationale. À cette table ronde participaient deux évêques du Soudan, un du Nord et un du Sud, et le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme pour le Soudan. Elle fut suivie d’une conférence de presse. Nous avons décidé de répercuter les résultats de ce colloque dans plusieurs départements. C’est ainsi qu’en liaison avec une ou plusieurs associations du collectif, j’ai pu faire toute une tournée en France dans près de 110 villes. J’ai pu ainsi aller à l’université d’Aix en Provence où pendant 4 ans de suite je suis allé passer avec les étudiants une journée sur le Soudan.

En avril 2009, à cause de mon âge (j’ai 84 ans) et de petits ennuis de santé, mes supérieurs Pères Blancs m’ont demandé de me retirer et de laisser le comité à une nouvelle équipe. Nous avons donc tenu une assemblée générale, le 6 juin 2009, pour entériner mon départ et mettre en place la nouvelle équipe.

Avec aussi des engagements de prêtre
Pendant ces 57 ans, suite aux 4 années passées à Nasso, j’ai été tout le temps plongé dans les problèmes matériels, finances et développement. Mais à chaque étape de ma vie, j’ai toujours essayé d’avoir des engagements de prêtre. À Sikasso, je donnais des cours de catéchèse dans des écoles primaires ; à Bamako, je m’occupais du groupe hospitalier du Point G où j’allais, au moins deux fois par semaine, célébrer l’Eucharistie et visiter les malades. J’étais très lié à toute l’équipe médicale.

À Khartoum, j’ai organisé une “communauté francophone” où il y avait, tous les samedis après-midi, cours de catéchèse suivi de la messe en français. Rentré en France, j’ai pu assurer un service régulier, pour la semaine et le dimanche, à la Maison provinciale des Soeurs Franciscaines Missionnaires de Marie (160 à 180 personnes), la chapelle des religieuses servant de succursale à la paroisse.

Pleinement missionnaire au service de notre Société et de l’Afrique
Je continue de cultiver les relations que j’avais, par le Comité Vigilance Soudan, avec les nombreuses organisations non gouvernementales françaises et internationales que j’ai essayé de sensibiliser aux problèmes du Soudan pendant cette période de 24 ans. J’ai pu le faire à travers plus de 95 interviews avec différentes radios. Je continue également de faire partie du Lions Club International, intéressant les gens aux problèmes de l’Afrique et à l’Association des Amis des Pères Blancs.

Voilà 58 ans que j’ai prononcé mon Serment de Missionnaire d’Afrique. En Afrique, j’ai surtout été chargé des problèmes de développement ; en France, j’ai œuvré avec Vigilance Soudan pour la défense des droits de l’homme. Je dois dire que dans ces deux parties de ma vie, je me suis senti pleinement missionnaire au service de notre Société et de l’Afrique. Pour équilibrer ma vie de prêtre, j’ai essayé, dans la mesure du possible, de toujours joindre à toutes ces activités une tâche pastorale.

Hubert Barbier

Tiré du Petit Echo N° 1014 2010/8

Voir aussi : Voix d'Afrique : De la Bourgogne au Soudan

 

 


 

Missionaries of Africa
France Paris


Hubert Barbier M.Afr.

A fully missionary life

Development Problems
Protection of Human Rights

During my secondary schooling, I opted for mathematics and industrial design. I resisted the Lord’s calling until I was 21. After Kerlois, novitiate at Maison Carrée, military service in Algeria and France, I did my theology at Thibar and Carthage.

There were no hot showers at Thibar. From my family and friends, I then collected some of the money required to install hot showers. This must be written in my personal file, because after my ordination at Carthage in 1953, my first appointment was to Nasso, near Bobo-Dioulasso, Burkina Faso, as bursar and builder of a modest seminary where I introduced double entry accounting.

After 4 years at Nasso seminary, I wanted to go and learn an Africa language and do some ministry. I was sent to the diocese of Sikasso, in Mali. After the language course, the Bishop of Sikasso asked me to look after the finances and the development projects, which I did until my home leave.

Once again, at the end of my leave, I was appointed Treasurer General of the Archdiocese of Bamako, Mali. I must say I could have wept as I knew that major problems were before me. I had to put order into the Archdiocesan finances.

I held the post of Episcopal Vicar and Treasurer General of Bamako for 16 years, two years with Archbishop Leclerc, White Father, and 14 years with African Archbishop Luc Sangaré. In the course of these 16 years, almost everything in the Archdiocese had to be equipped and built.

With Archbishop Sangaré’s authorisation and aid from Lions Club International, I created and ran a village for the aftercare and social rehabilitation of people with leprosy. In this regard, I took part in several congresses in Africa and even in Mexico.

In Sudan
Hubert in discussion with Archbishop Gabriel Zubeir Wako, now Cardinal Archbishop of Khartoum (Sudan).Once back in France for my home leave, I received a new appointment. I had to re-learn English and go to the Sudan to take charge of one of the most important projects ever financed by Misereor Germany. I accepted the appointment. It concerned creating a multipurpose institute to train paramedical personnel in South Sudan. It involved the construction of 20 buildings and equipping them, 2,000 km from any port; determining the medical programmes with the Government of South Sudan and the WHO; finding personnel and rebuilding a part of the government hospital in view of working practice for male and female students. The Institute was formally inaugurated in 1983 and the first student midwives qualified with diplomas in 1985.

After 9 years in the Sudan, my Superiors appointed me to France. I was put in charge of business relations. I was to contact company directors to find subsidies for our activities in Africa. However, from 1987, I wanted to find out what could be done for the Sudan. I was able to meet with Doctor Bernard Kouchner, Secretary of State for Humanitarian Action, and with Madame Simone Veil of the European Union, who ensured that the Sudan was condemned for Human Rights violations. However, this was not enough.

Vigilance Sudan
In January 1992, with two friends, we founded the Vigilance Sudan Committee for the protection of Human Rights in the Sudan. Its aim was information and awareness-raising of the problems in the Sudan. In April 1992, we published our first Report: we are now at number 158.

From his desk, Hubert received news and sent articles to the Vigilance Soudan website.In December 1992, I took part in a round table on ‘The problem of Christian minorities in the Near and Middle East.’
Father Henri Boulad, Vice-Provincial of the Jesuits in Egypt, declared, ‘There is a very serious problem which remains unsaid. It concerns Christian minorities in the Sudan.’ He added, ‘Here, we have with us Father Hubert Barbier, until recently a Missionary in the Sudan, who knows this problem well.’ After this speech, the Chairman of the Round Table gave me the floor. I must have spoken with some passion, because, at the break, Mr. Littman, from the International Movement for Reconciliation, came to tell me, ‘We must help you to speak at the United Nations Commission on Human Rights at Geneva next February-March!’ This speech was fixed for the 16th February.
See his Talk in Geneva on the 16th February 1993 at the United Nations Commission on Human Rights (about Sudan)

See also the Conference by Cardinal Poupard : Josephine Bakhita, 1869-1947. (Paris 30th March 2003)
From Slavery to the Freedom of Christ

While we were preparing my speech for Geneva, Mr. Littman sent me a document that the Sudanese Delegation was circulating. This paper stated, ‘There are no political detainees in Sudan.’ Therefore, at the end of my address, we added, ‘Since the Sudan claims that there are no political detainees in Sudan, we request the United Nations Commission on Human Rights to appoint a special rapporteur to investigate the Sudan.’

The resolution voted at the end of the session condemned the Sudan for its Human Rights violations and requested ‘the appointment of a special rapporteur to investigate these violations.’ This was the first great success of the Vigilance Sudan Committee. From that time on, my path was clear: Human Rights in the Sudan had to be protected.

My path was marked out
Sale of wines organised by Hubert to benefit the Missionaries of Africa. We created a Steering Committee with Secours Catholique, CCFD, ACAT, Pax Christi, Cimade and Vigilance Sudan. In October 1996, we organised a round table including an ecumenical celebration and a round table in the hall of the National Assembly. This round table included two Sudanese Bishops, one from the North and one from the South, as well as the Special Rapporteur for the Human Rights Commission for the Sudan. This was followed by a press conference. We decided to relay the results of this round table to several French regions. In this way, in contact with one or several associations of the group, I was able to make a tour of France, visiting almost 110 towns. Likewise, I was also able to go to the University of Aix en Provence, where for 4 consecutive years I spent a day on the Sudan with the students.

In April 2009, due to my 84 years, and some small health problems, my White Father Superiors asked me to retire and to leave the Committee to a new team. We therefore held a General Assembly on the 6th June 2009 to ratify my departure and install the new team.

With priestly commitments
For these 57 years, following on my four years at Nasso, I was always immersed in material problems, finance and development. However, at each stage of my life, I always tried to have priestly commitments. At Sikasso, I gave catechism classes in primary schools; at Bamako, I was involved in the Point G hospital group, when I would go at least twice a week to celebrate the Eucharist and visit the sick. I was very close to the entire medical team.

At Khartoum, I organised a ‘francophone community’, where every Saturday afternoon there would be catechism classes followed by Mass in French. Once back in France, I was able to provide regular services, during the week and on Sunday, at the Provincial House of the Franciscan Missionary Sisters of Mary (160 - 180 people), in the Sisters’ chapel, which served as a parish outstation.

Fully missionary
at the service of our Society and Africa

I continue to cultivate the relations I had through the Vigilance Sudan Committee with the many French and international Non-Govern­mental Organisations that I tried to make aware of the problems of the Sudan during this 24-year period. I was able to do so through over 95 interviews with different radio stations. I also continue to belong to the Lions Club International, raising people’s interest in the problems of Africa, and to the White Fathers (Parents and) Friends Association.

It is now 58 years since I took my Oath as a Missionary of Africa. In Africa, I was principally concerned with development issues; in France, I worked with Vigilance Sudan for the protection of Human Rights. I must say that in both these parts of my life, I felt entirely a Missionary at the service of our Society and of Africa. In order to balance out my priestly life, I always tried, as far as possible, to link all my activities with a pastoral undertaking.

Hubert Barbier

From Petit Echo n° 1014 2010/8