Voix d'Afrique N°103.


L’engagement dans l’Association
des Amis des Pères Blancs (AAPB)



On pourrait l’appeler : Triple A (Association des Amis des Africains). Il est important de clarifier à nouveau le but de l’association et par conséquent des journées d’amitié.

Si on regarde son histoire, on peut constater l’évolution : En 1931 : au point de départ : Association Sahara-Soudan pour l’aide matérielle et morale des Missionnaires Pères Blancs.
En 1936 : un nouveau nom un peu surprenant : « Association pour la propagande française au Soudan (Mali, Burkina Faso). Puis elle disparait au moment de la guerre pour renaître après 1945.
En 1958, l’association devient : « Le Comité d’Assistance aux Pères Blancs ».
En 1962, un petit changement : « Le Comité d’Assistance aux œuvres des Pères Blancs. »
Enfin, en 1978, le nom actuel est choisi : « Association des Amis des Pères Blancs. »

L’enracinement
de notre engagement

Il est clair que la grande majorité d’entre nous se sont joints à l’Association par amitié pour un membre de notre famille qui était ou qui est toujours missionnaire d’Afrique, Père Blanc. Lors de ses congés en France, il avait eu l’occasion de nous sensibiliser aux problèmes de l’Afrique et il avait fait appel à nous pour l’aider dans la réalisation des projets qu’il avait conçus pour améliorer la situation des Africains au sein desquels il vivait et annonçait la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu révélé en Jésus-Christ.
Depuis lors, le temps a passé et par le bouche à oreille d’autres membres sont venus se joindre à nous. Les motivations ont donc peut-être changées.

S’engager au sein d’une association vient en général d’une présentation du sens de cette association par un membre qui vous connaît, qui appartient souvent au cercle de vos amis ou de votre famille. Parfois, c’est simplement un coup de main demandé pour tenir un stand ou préparer le repas aux journées d’amitiés. C’est pourquoi il est bon de revivifier le sens de notre association, pour qu’au-delà de ce dévouement extraordinaire et ce financement de projets, il y ait une transformation personnelle et commune du regard et de l’intérêt que nous portons aux Africains et aux problèmes de l’Afrique.

Une passion pour l’Afrique
et les Africains

Le Cardinal Lavigerie disait : « J’ai tout aimé de l’Afrique. Aimez donc ses peuples comme une mère aime ses fils en proportion de leur misère et de leur faiblesse. » (Instructions aux missionnaires 27 mars 1884)

De fait, ce qui frappe dans nos communautés c’est l’enthousiasme pour parler du pays où l’on a vécu de nombreuses années mais c’est aussi l’intérêt porté aux problèmes de l’Afrique. Oui, la grande majorité d’entre nous a une passion pour les Africains. Cela ne veut pas dire que nous approuvons naïvement tout ce qui se vit, mais nous souffrons avec ceux qui sont tourmentés par la guerre, nous prions pour tous ces pays qui recherchent leur unité. Bien sûr, il y a des voix discordantes et des critiques, mais au fond de nous-mêmes nous ne pouvons pas nier toutes les richesses de leur culture et de leur foi qui nous ont enrichis tout au long des années passées en Afrique.

Personnellement l’Afrique m’a aidé à porter un regard différent sur toute personne humaine. Je ne suis pas parti au Ghana pour sauver des âmes car je n’ai jamais vu une âme se promener dans la rue, mais je suis allé rencontrer des personnes avec des besoins humains, spirituels, psychologiques, sociaux. C’est ainsi que j’ai animé des retraites mais j’ai aussi grâce à l’Association des AAPB placé un moulin dans une prison pour procurer aux détenus un revenu et alléger le travail des femmes; j’ai assaini une prison en renouvelant les toilettes et l’écoulement des eaux, j’ai fait creuser des puits, mais j’ai aussi passé beaucoup de temps à la formation des futurs animateurs paroissiaux, religieuses et catéchistes.

C’est ce qu’on appelle une approche globale de l’apostolat, c’est-à-dire visant toute la personne humaine. C’est ce qui est visé aussi dans la formation des candidats, futurs missionnaires d’Afrique. (formation pas seulement intellectuelle et spirituelle, mais aussi psychologique, humaine, sociale.)

Le Pape François l’exprime ainsi dans son exhortation : « Le mystère de la Trinité nous rappelle que nous avons été créés à l’image de la communion divine, pour laquelle nous ne pouvons nous réaliser ni nous sauver tout seuls. À partir du cœur de l’Évangile, nous reconnaissons le lien intime entre évangélisation et promotion humaine, qui doit nécessairement s’exprimer et se développer dans toute l’action évangélisatrice. » (n° 178)
« L’évangélisation ne serait pas complète si elle ne tenait pas compte des rapports concrets et permanents qui existent entre l’Évangile et la vie personnelle et sociale de l’homme. » (N° 181)

Une passion qui est devenue enrichissement de leur culture et un sentiment très vif de la nécessité de les appeler à devenir eux-mêmes missionnaires et évangélisateurs. (Cela non pas à cause de la diminution des vocations missionnaires en Europe mais par la logique même de l’évangélisation).

Les chiffres sont éloquents :
Nous avons, en 2013-2014, 467 candidats en formation dont : 7 Européens, 5 d’Amérique du Nord et du Sud, 30 d’Asie, 11 Proche-Orient, et plus de 400 Africains.
La Société a maintenant un Ghanéen comme Supérieur Général ; en Afrique, de plus en plus de provinciaux sont africains et certains Pères Blancs africains sont choisis pour devenir évêques : le dernier en date, Placide Lubamba qui était provincial du Secteur RDC-Burundi-Rwanda.

Appel à partager la même visée dans l’apostolat
et la même passion pour les Africains
Une visée globale

En regardant quelques exemples des projets financés en 2013, on voit que, de fait, l’association partage les mêmes priorités que celles que nous avons à travers les trois domaines que vous avez choisis : domaine pastoral, formation et éducation, humanitaire. Il est bon d’exprimer au nom de tous les bénéficiaires une immense gratitude pour le dévouement de chacune et de chacun pour récolter les fonds nécessaires au financement de ces projets. Mais chacun le sait, l’argent n’est pas la seule motivation des journées d’amitié et l’ouverture sur les Africains est au cœur de chacun.
Il est bon d’établir entre nous des liens d’amitié qui dépassent les rivalités et qui montre une association famille à l’image de l’Église d’Afrique qui avait lors du synode africain parlé de l’Église famille.

Un regard actuel
et réaliste

Il est inutile de rêver du passé fondé sur la façon dont les membres de nos familles maintenant décédés témoignaient de leur apostolat. Ne pensons pas que l’habit blanc qui nous caractérisait peut à nouveau être un chemin de témoignage. Mais essayons de vivre dans ce monde actuel de façon réaliste, c’est-à-dire en prenant en compte la dimension multiculturelle et interreligieuse de la France.

Rencontre
et accueil des Africains

Notre Association est destinée à aider les Africains dans les difficultés qu’ils rencontrent : de plus en plus de projets sont présentés par des Missionnaires d’Afrique africains et par conséquent on peut s’interroger sur la possibilité de leur présence aux journées d’amitié. On doit se questionner sur la façon dont notre engagement change notre regard et notre comportement face aux Africains.

Conclusion

Voilà donc quelques réflexions pour susciter des questions, des pistes de vie nouvelle pour nos associations. Terminons par une citation du Pape François dans son exhortation. Certes, il s’agit du paragraphe sur la place privilégiée des pauvres dans le peuple de Dieu, mais on peut l’appliquer à nos associations :

« Notre engagement ne consiste pas exclusivement en des actions ou des programmes d’assistance ; ce que l’Esprit suscite ce n’est pas un débordement d’activisme mais avant tout une attention à l’autre qu’il considère comme un avec lui. Cette attention aimante est le début d’une véritable préoccupation pour sa personne, à partir de laquelle, je désire chercher effectivement son bien. »



Yves Masquelier
M. Afr.
Animateur des Associations des Amis des Pères Blancs


.............. Suite