Voix d'Afrique N° 69
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"Emmanuel, Dieu avec nous"

Les vœux que nous partageons pour 2006 sont traditionnels, mais pas une routine. Ils expriment et ils font grandir l'amitié entre nous, les missionnaires d'Afrique, et vous, nos parents et amis. Au nom de toute la Province de France, je vous exprime sincèrement mes souhaits de Joyeux Noël et de bonne santé chaque jour de l'année qui vient.

Pour être plus concret, permettez-moi d'entrer dans quelques détails.
Dieu avec nous, c'est un bébé à Bethléem qui ouvre les yeux pour la première fois. Que voit-il d'abord ? Sa mère, bien sûr, comme tout nouveau né. Puis son regard suit celui de Marie : elle accueille les bergers. Ce sont les plus pauvres de la société. Notre expérience de missionnaires d'Afrique nous a appris que les bergers sont au plus bas de l'échelle sociale, pas assez doués pour être scolarisés, marginalisés et sans aucune qualification, avec pour seul horizon un troupeau de brebis. C'est pourtant à eux que les anges sont envoyés ; c'est à eux que l'enfant Jésus adresse son tout premier sourire. Dieu lui-même leur sourit avec tendresse par les yeux de Jésus.

Aujourd'hui, c'est l'Afrique qui est appelée à la crèche. Dieu lui sourit par la présence, entre autres, de missionnaires, nos confrères, vos amis. Très souvent nous sommes peinés de voir l'Afrique aujourd'hui marginalisée : c'est le pays des révolutions, des massacres, du sida, de la corruption, de la malaria, de la chaleur, des famines. L'auditeur est fatigué d'entendre toujours des mauvaises nouvelles.

"Passons à autre chose !" Mais nous, nous savons que du Cap à Alger, de Bamako à Nairobi, de Kinshasa à Lilongwe, des hommes et des femmes luttent pour la vie. Dans les quartiers des villes comme dans les villages de brousse les plus reculés, des chrétiens se rencontrent sans bruit chaque semaine pour écouter la parole de Dieu, partager et prier simplement. Ils forment des communautés vivantes, joyeuses, qui chantent et dansent, non pas pour oublier mais pour faire face avec courage au défis du monde moderne, avec une espérance que les savants traitent d'inconscience, mais que nous savons ancrée dans cette foi en l'homme et en ce Dieu-avec-nous qui ne peut pas nous abandonner.

L'année qui s'achève a eu son lot de souffrances, d'injustices, de fléaux ; elle a donné aussi d'immenses raisons d'espérer. Un million de jeunes se sont rencontrés à Cologne. D'une façon moins spectaculaire, plusieurs milliers se sont levés, en Afrique, en Asie ou en Amérique Latine comme en Europe, pour reprendre le flambeau des mains des anciens missionnaires.

En 2006, "les boiteux marchent, les aveugles voient, les sourds entendent, les morts ressuscitent, la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres" (Luc ch.7, v.22). Dieu est avec nous, plus que jamais !

Qu'Il fasse briller son visage sur chacun d'entre vous, et qu'Il donne à l'Afrique, notre pays d'adoption, de voir, d'entendre, de ressusciter pour une vie toujours nouvelle.

Louis Vernhet
Missionnaire d'Afrique,
Provincial de France


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BIENHEUREUX CHARLES DE FOUCAULD

Les missionnaires d'Afrique se réjouissent de la béatification de leur compagnon. Nous proposons les réflexions de l'évêque de Laghouat (Sahara Algérien) sur le frère universel, l'ermite du Hoggar.

Charles de Foucauld n'était pas un homme 'parfait', loin de là. Nous déplorons ses frasques de jeunesse et ses faux pas d'homme mûr, voire de converti. Et s'il avait donné un visage plus humain, voire plus fragile, à la sainteté ? Il n'a pas tout réussi dans sa vie, même dans ses plus hauts sommets. Il n'a pas toujours su se défaire de ses réflexes militaires, et n'a vu l'avenir du Hoggar et du Sud Algérien que dans le giron colonial, fût-il à visage humain. Peut-on lui reprocher d'avoir été de son temps ? À un éminent interlocuteur traitant Charles de Foucauld de 'chantre de la colonisation', Mgr. Tessier, archevêque d'Alger, répondait : “Non, il a été le chantre de la fraternité universelle dans le contexte de la colonisation.”

Il n'empêche que le fond de l'homme, ses choix radicaux pour le service de Dieu et de son “Bien-aimé Jésus”, son souci de rejoindre les plus lointains et les plus pauvres, ses heures passées dans la prière et l'adoration, ses journées à accueillir toute personne en 'frère', son errance spirituelle en quête de sa vocation, et tant d'autres aspects de sa personnalité nous le rendent proche et accessible. Enfin un saint à notre portée, même s'il reste … inimitable…

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Claude Rault,
Evêque de Laghouat



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