Voix d'Afrique N°80.....

Un Assistant provincial heureux !!!

Le Père Dominic Apee, missionnaire d’Afrique, est, depuis cinq ans, assistant provincial de la Province d’Afrique Centrale (PAC), à l’est de la République Démocratique du Congo (RDC). Il réside à Bukavu, et il nous explique lui-même qui il est et ce qu’il fait.

Je m’appelle Dominic Apee. Je viens du nord du Ghana, du diocèse de Navrongo-Bolga-tanga. Né en 1960, j’ai perdu mon père assez vite. Ma maman, elle, vit toujours. J’ai trois frères. Mon père était enseignant, et ma mère, qui est à la retraite maintenant, était assistance sociale.
Durant mes études au collège, j’étais très proche des Pères Blancs, car nous habitions tout près de la cathédrale. J’allais à la messe chaque jour, et pendant 15 ans, j’ai été responsable des enfants de chœur. Les Pères avaient une grande confiance en moi. Je les accompagnais souvent au Burkina Faso pour faire des achats.

Dominic en compagnie de ses neveux et nièces qui se préparent pour la fête de la fin des examens. En 83, je suis entré chez les Pères Blancs. Ce fut Tamale pour la philosophie, Fribourg pour le noviciat. Après mon stage au Zaïre, dans le diocèse de Bunia, j’ai terminé ma formation à Toulouse.
Ordonné prêtre en 1991, je suis retourné au Zaïre. Après le stage de langue, je suis allé à la paroisse de Laybo, du diocèse de Mahagi. J’y ai passé 3 ans. C’était le travail pastoral ordinaire, avec un accent particulier pour la jeunesse. Puis j’ai été envoyé au diocèse de Bunia. En 1995, on m’envoie comme économe-formateur dans notre maison de philosophie de la Ruzizi, à Bukavu.
J’y suis resté trois ans. C’était au temps de Kabila père, et, un jour, j’ai même dû m’enfuir avec les séminaristes dans la forêt. Nous nous sommes cachés pendant 4 semaines. On pensait mourir, mais Dieu était avec nous.

En 1998, je pars à Rome pour des études en histoire de l’Eglise. En 2001, c’est le retour à la Ruzizi où je suis resté encore deux ans comme formateur et professeur. Dans le même temps, je donnais des cours au séminaire interdiocésain, à 5 km de la ville, chaque vendredi et samedi.

Assistant Provincial
A Bukavu, à l'ordination  de son jeune confrère Jean-PaulEn 2003, je suis devenu Assistant Provincial. Cela a coïncidé avec la réunion des anciennes provinces : Rwanda, Burundi, Congo. C’était la naissance de la PAC (Province d’Afrique Centrale). Le Provincial est le Père Benno Baumeister.
Ce travail est un travail d’équipe. On essaie de partager et de prendre les responsabilités ensemble. Nous nous répartissons les visites des confrères et des communautés. Avant de partir, on regarde les problèmes qui se posent là où l’on va et, au retour, on fait le rapport. En allant partout, on acquiert une vue plus large.

Ce qui est bien dans ce travail, c’est la collaboration des confrères. Ils ne regardent pas ton statut d’Assistant. Avec eux, on partage vraiment ce qu’ils vivent. Au début, je ne connaissais pas beaucoup de confrères, puisque j’étais resté au séminaire.
Bien sûr, ce qui a été vécu au Rwanda, au Burundi ou au Congo, se ressent encore dans la Province. En fait, c’est le passé des confrères, leur vécu. On ne peut pas faire abstraction de cela. Cela fait partie de l’histoire.
Il est bon d’écouter chacun. Lorsqu’on arrive, le confrère a besoin de parler, de dire ce qu’il a vécu, où il en est. Pour lui, ce n’est pas du ‘déjà dit’, même s’il le redit encore. C’est comme une thérapie. Il faut avoir la patience pour aider les gens.

Aujourd’hui, les choses bougent
Dans la Province, on voit aussi les changements qui se font, malgré la guerre : effort de la population pour cultiver, se prendre en charge. On voit les efforts pour la paix et la sécurité. Au Rwanda, la paix est là, la sécurité est là. On peut se promener le soir sans inquiétude. Au point de vue de la paix, les choses sont maîtrisées.

Au Burundi, quand nous avons commencé, c’était difficile de voyager car il y avait des règle-ments qu’il fallait suivre : ne pas voyager l’après-midi, à cause des rebelles, car on pouvait avoir des problèmes. Par exemple, si tu vois des gens courir vers toi, toi, tu fais demi-tour. Si tu vois deux ou trois maisons en train de brûler devant toi, tu fais demi-tour. Si tu conduis, et, pendant 15 minutes, tu ne vois personne sur la route, tu fais demi-tour, car cela veut dire qu’il y a quelque chose.
Actuellement, on fait encore attention, mais ce n’est pas comme avant. Avant, par ordre de l’Etat, on fermait les villes à 16 heures. On bloquait tout le monde.

Au Congo, la guerre a duré longtemps. Maintenant, il y a eu les élections qui se sont assez bien passées. Dans une bonne partie du pays, la paix est là. Les gens sont plus libres. Bien sûr, à l’Est, il reste encore quelques endroits où il ne faut pas trop s’aventurer à cause des dangers.
Cependant, des efforts énormes sont faits. La mentalité des gens change petit à petit. On ne peut pas tout attendre d’en haut, de l’Etat.

Activités autres mais importantes
Au Congo, avec les enfants en situation difficileA côté de mon travail d’assistant provincial, j’assure toujours des cours d’Histoire de l’Eglise au grand seminaire St Pie X de Bukavu. Cela me donne contact avec l’Eglise locale.
Je suis engagé aussi avec la communauté Sant’Egidio, pour l’encadrement des enfants de la rue, à Bukavu. Il s’agit des enfants qui dorment autour de la cathédrale de Bukavu. Deux fois par semaine, je les rassemble pour des causeries ‘morales’ qu’eux même proposent : le respect, l’honnêteté, la propreté, l’importance de la famille, la religion, Dieu, être une personne intègre, l’éducation, préparer son avenir, le projet de Dieu sur chaque personne, les divertissements sains, l’amour, la sexualité… En fait, plus que les sujets abordés, c’est l’amitié avec eux qui est très importante et qui établit une confiance réciproque. Avant d’avoir cette relation avec eux, j’avais moi-même toutes sortes de préjugés sur les enfants de la rue, et j’avais peur d’eux. Avec l’amitié, j’apprends à les connaître, à les respecter et j’essaie de les faire sortir de leur situation.

A cause de cette confiance entre nous, plusieurs viennent me demander de les aider à rentrer en famille, apprendre un métier, ou faire du petit commerce. Certains veulent même qu’on fasse un centre pour eux. Personnellement, je ne suis pas prêt à le faire, même si, parfois, cela pourrait être utile. Il me semble plus important de les aider à se réintégrer dans leurs familles et de les aider à quitter la rue. Nous avons réussi à le faire pour quelques uns, et plusieurs nous demandent de pouvoir faire de même.

Tout ce travail demande de la patience et des moyens. J’ai la patience, quant aux moyens, je compte sur les bonnes volontés.

P. Dominic Apee
M. Afr.


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